Sous les robes de Christian Dior

Cette semaine, FrenchFlicks est allé à la rencontre d’un jeune réalisateur français de 36 ans installé à Brooklyn, Frédéric Tcheng, à l’occasion de la sortie aux États-Unis de son fascinant documentaire Dior et moi. 

C’est à Brooklyn, dans le quartier pas encore complètement gentrifié de Bedstuy que Frédéric Tcheng nous a donné rendez-vous. Depuis 2002 et son entrée à l’université Columbia, pour étudier la réalisation, le Lyonnais d’origine s’est installé à New York. Venant d’une famille d’ingénieurs, Frédéric Tcheng ne s’imaginait pas réalisateur. « J’ai moi-même fait une école d’ingénieurs, les Ponts et chaussées. Mais les stages successifs dans le milieu du cinéma que je faisais à côté de mes études ont été une révélation pour moi. Depuis que je suis adolescent, j’ai une petite caméra, et je filmais souvent mes amis, ma famille. Inconsciemment, j’avais déjà cette attirance pour la réalisation »

À 36 ans, Frédéric Tcheng sort vendredi 10 avril Dior and I, son deuxième film, trois ans après Diana Vreeland : The Eye Has to Travel, un documentaire sur la célèbre éditrice d’Harper’s Bazaar qu’il a coréalisé. « Depuis ma participation à un premier documentaire sur le couturier Valentino en 2008, je me suis spécialisé par hasard sur le monde de la mode. Rien ne me prédestinait à ce plan de carrière. Au départ, je n’avais même prévu de faire des documentaires, je voulais faire de la fiction »

L’idée d’un documentaire sur les coulisses de la Maison Dior est celle d’Olivier Bialobos, responsable de la communication à Dior. « Je les ai tout de suite prévenus qu’un film promotionnel de 90 minutes n’intéressait personne », précise le réalisateur. « J’ai beaucoup communiqué avec Dior en amont pour qu’il n’y ait pas de malentendus. La maison savait qu’elle prenait un risque en m’autorisant à filmer ce moment charnière de leur existence, avec l’arrivée d’un nouveau directeur artistique, Raf Simons. C’est ce qui donne de l’intérêt au documentaire ». La période était en effet critique pour Dior, un an après le licenciement médiatique de John Galliano suite à ses propos antisémites et racistes proférés à une terrasse de café parisienne.

« Donner une voix aux travailleuses de l’ombre » 

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Assuré d’une pleine liberté créative, Frédéric Tcheng a alors dû convaincre le très discret Raf Simmons d’être filmé pendant la préparation de sa toute première collection pour la maison Dior. « À l’origine, il n’était pas du tout partant. Je lui ai écrit une lettre d’intention pour lui présenter le film que j’avais envie de faire. Je lui ai expliqué que le documentaire ne serait pas un portrait de lui, mais un film choral sur les hommes et les femmes de l’ombre de Dior. Comme Christian Dior en son temps, Raf Simons n’est pas à l’aise avec la presse. Il a du mal à vivre l’aspect public de son métier ». Pas encore convaincu mais intrigué, Raf Simons a ouvert les portes de Dior à Frédéric Tcheng pendant une semaine. « La première fois où je l’ai rencontré, c’était à travers la caméra. Je l’ai filmé lors de son premier jour à l’atelier Dior, quand il a rencontré son équipe à Paris. D’emblée, j’étais dans la même position que les couturières, qui ne le connaissaient qu’à travers des articles sur internet. Leur point de vue était aussi le mien. C’était très intéressant de pouvoir donner une voix à ces travailleuses de l’ombre »

Le résultat est saisissant. Des ateliers au bureau de Raf Simmons, des moments de tension aux larmes de joie, la caméra de Frédéric Tcheng est discrète. En filmant l’humain, le travail pointilleux des couturières, et le processus créatif de Raf Simons, le réalisateur intéressera même les plus indifférents au monde de la mode.

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